L’utilisation de la neuroimagerie pour comprendre l’acquisition du langage

Date : 18 septembre 2024
Heure : 11h30 à 12h30
Lieu : En salle et en ligne

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 L’utilisation de la neuroimagerie pour comprendre l’acquisition du langage

On pense généralement que les enfants maîtrisent leur grammaire à l’âge scolaire, mais des recherches psycholinguistiques et neurolinguistiques ont montré que la grammaire pouvait se consolider à la fin de l’école primaire. Il se peut également que certains aspects du traitement neurolinguistique  du langage soient affectés par la régularité morphologique ou la complexité syntaxique et que la consolidation soit donc retardée jusqu’à l’adolescence. Les potentiels évoqués (PÉs ou ERP) des enfants qui sont encore en train d’acquérir leur première langue (L1) peuvent ressembler à ceux des apprenants d’une deuxième langue (L2), par exemple en suscitant des N400, reflétant un traitement lexico-sémantique, au lieu de LANs et P600s adultes pour les erreurs grammaticales (Clahsen et al 2007 ; Dube et al, 2018).

Je présenterai les résultats de cinq études PÉs portant sur le traitement de l’accord avec des jeunes, des ados et des adultes, et visant des processus morpho-syntaxiques régulier ou irréguliers du français. Des paradigmes audio-visuels d’appariement d’images et de phrases ont été utilisées. Ils visent des erreurs de genre sur les déterminants (*le clef grise), ou sur les adjectifs qui ont des schémas irréguliers en français (le chapeau *grise), ainsi que l’accord sujet-verbe sur la finale du verbe (par exemple, Les lions, ils rugissent présenté avec une image d’un lions qui rugit), ou sur liaison régulière entre le pronom et un verbe à voyelle initiale (par exemple, Les filles, elles aiment la mousse au chocolat présenté avec une image d’une fille avec de la mousse au chocolat).

Nos études montrent que le traitement des erreurs évolue chez les enfants, les adolescents et les adultes. Le traitement des adjectifs et des déterminants donne lieu à des PÉs distincts dans tous les groupes, mais chez les adolescents, les schèmes des adjectifs ne correspondent pas encore au modèle adulte. En ce qui concerne l’accord sujet-verbe, les schèmes des adolescents sont également différents de ceux des adultes. De plus les erreurs de commission (tel l’exemple des lions) ont été traitées de manière plus saillante que les omissions (similairement à l’italien, Cantiani et al, 2013, et l’anglais, Dube et al, 2018). Enfin les processus réguliers ont suscité chez les adolescents des PÉs semblables à ceux des adultes.

Je proposerai un modèle neurolinguistique de l’acquisition du langage (L1) liée à la compétence linguistique qui s’inspire de  modèles d’acquisition L2 (Steinhauer, 2014).

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Phaedra Royle détient un doctorat en linguistique, et est professeure titulaire à l’École d’orthophonie et d’audiologie de l’Université de Montréal et membre du Centre de recherche sur le cerveau, le langage et la musique (CRBLM/BRAMS) et du Centre de recherche interdisciplinaire sur le cerveau et l’apprentissage (CIRCA). Elle s’intéresse à la psycholinguistique, à la neurolinguistique, à l’acquisition du langage, à la morphologie et à la morphosyntaxe, principalement dans des populations françaises avec ou sans trouble développemental du langage (TDL).